Il n’y a que la photographie pour empêcher le paysage de ressembler au paysage.
Il n’y a que la photographie pour donner au plaisir immédiat des images cette capacité de relier par quelque point notre regard et notre corps à une divergence radicale mais insaisissable, une manière chaude et différente d’appréhender le réel. C’est qu’une corporalité étrange, qui est propre à la brume ou aux stries du dehors, fait la teneur profonde et intime des images de Sébastien Arrighi. Il y a dans ses photographies la tension d’un désir qui se déplie entre des corps, des objets, des morceaux de paysages, sans que la pensée puisse exprimer cela. Ce sont des relations anonymes et opaques qui arrivent sans mot, sans nom, des relations recouvertes et masquées.
Comme cette pierre à peu près cubique, striée de rose et autour de laquelle des petits cailloux se perdent dans une sorte de sable ou de ciment (Death Valley, California, 2019). L’opacité et le secret de cette pierre fait tenir au dessus d’elle un peu d’obscurité alors que la lumière de la pierre s’affiche avec un ton vigoureux et net. Et nous sommes aussitôt pris dans un tournoiement, dans la rapidité des changements de perspectives et de colorations qui est propre aux rencontres les plus sensuelles, où l’intimité est touchée à fleur de peau dans ses changements, ses variations insaisissables, ses plans contrastés (…)
—
Texte extrait de:
Paul Emmanuel Odin – Silent Show. La dissemblance de l’image à la pensée (le désir)